Travail ou apprentissage collaboratif
Travail ou apprentissage collaboratif

L'apprentissage collaboratif repose sur une démarche pédagogique qui s'inscrit dans une approche socio-constructiviste de l'apprentissage, qui suppose :
  • un regard réflexif sur sa propre pratique
  • une relation nécessaire avec les autres apprenants qui jouent un rôle important dans la construction par chacun de ses connaissances : les connaissances sont construites par un individu par échange, confrontation et partage des idées et productions. La construction des connaissances se réalise durant l'interaction sociale, où le conflit socio-cognitif joue un rôle important : Vygotski (1985) introduit l'idée de zone proximale de développement, le niveau inférieur de cette zone étant défini par ce que le sujet peut apprendre par lui-même, le niveau supérieur étant défini par ce que le sujet peut apprendre en collaboration avec d'autres. Plus récemment, la théorie de la cognition distribuée (Hollan & al 2000) situe l'apprentissage au niveau d'une communauté, cette idée est développée dans le concept essentiel de communauté de pratique. L'apprentissage collaboratif est lié également au concept d'intelligence collective (Levy 1997).
L'apprentissage coopératif (différence avec l'apprentissage collaboratif explicitée dans Dillenbourg 99) fait moins appel à l'autonomie. Dans le cas de l'apprentissage coopératif, il y a une division et un partage des tâches ; l'interaction entre les participants à la tâche commune peut alors se limiter à la coordination de sous-tâches affectées à chaque apprenant, cela peut être une étape d'initiation au travail en groupe. Par contre, dans un travail collaboratif, il y a confrontation et débat pour réaliser une tâche commune. Le rôle du responsable du groupe n'est pas le même dans les deux types de travail : la construction d'une maison relève du travail coopératif, le responsable jouera un rôle de chef de chantier alors que l'interprétation d'un chant choral relève du travail collaboratif, le responsable aura plutôt un rôle de chef d'orchestre (métaphore proposée dans la fiche repère apprentissage collaboratif / coopératif sur le site TIC et FOAD).
L'apprentissage peut être ainsi compris comme un processus dynamique qui se déroule dans un contexte social où le partage, la confrontation et la négociation conduisent les apprenants à construire leurs propres connaissances : l'apprentissage résulte d'un travail individuel soutenu par des activités de groupe. L'apprenant partage des ressources avec le groupe et investit le travail réalisé par le groupe dans la construction de ses connaissances. Un préalable au travail collaboratif est la construction d'une sémantique commune pour les termes utilisés dans la communication au sein d'un groupe : l'émergence d'un consensus, la construction de significations partagées est le premier indice d'émergence d'une communauté de pratique. Le développement de l'encyclopédie numérique Wikipedia s'inscrit dans cette démarche collaborative (cf. le dossier que la veille scientifique et technologique de l'INRP y consacre (http://www.inrp.fr) Le débat scientifique est une étape également importante qui s'inscrit dans le cadre d'un apprentissage collaboratif scientifique. L'activité collaborative se fonde et s'organise sur la base d'un accord initial sur la tâche commune à réaliser, la tâche peut évoluer et les moyens pour la réaliser ne sont pas nécessairement prédéfinis. Ce type de travail n'est pas nécessairement naturel, il est lui aussi le résultat d'un apprentissage, il prépare également les individus à l'évolution actuelle des formes de travail.
En réalité, l'on trouve une grande variété de pratiques sous l'étiquette "apprentissage collaboratif", cependant, tout travail en groupe n'est pas automatiquement efficace. Le problème crucial pour l'enseignement, et plus particulièrement pour la conception de dispositifs de formation hybrides (combinant formation présentielle et à distance), est celui de la recherche des conditions d'un apprentissage collaboratif efficace (Henri & Lundgren-Cayrol 2001). De l'analyse des premières expériences de FOAD, il ressort que la construction de la collaboration doit être accompagnée par des tuteurs humains de manière explicite et significative, du moins dans les premiers temps de la formation.
Un outil informatique pour l'apprentissage collaboratif doit fournir les conditions qui rendent la collaboration efficace (Dillenbourg & Jermann, in Guir 2002) :
  • structurer le travail du groupe en préparant des scénarios ;
  • favoriser l'émergence d'interactions productives ;
  • favoriser la régulation par l'enseignant des interactions entre pairs ;
  • favoriser la construction d'une représentation partagée du problème par les apprenants.
Dans le même ouvrage, sont décrites plusieurs expériences visant à favoriser l'apprentissage collaboratif : les effets comparés des télédiscussions chez les novices et les experts (Roux S. & Viens J.), les comportements des futurs enseignants dans des communautés virtuelles d'apprentissage (Rhéaume J. & Lafferrière Th.) et les conditions facilitant l'apprentissage collaboratif à distance (Charlier & al).

Références
Dillenbourg P. (1999), What do you mean by collaborative learning ?, In P. Dillenbourg (ed.) Collaborative learning : Cognitive and Computational Approaches, (pp.1-19) Elsevier, Amsterdam.
Guir R. (ed.) (2002), Pratiquer les TICE : former les enseignants et les formateurs à de nouveaux usages , De Boeck, Bruxelles.
Roux S., Viens J. Les télédiscussions comme outils de construction des connaissances, In R.Guir (ed.) Pratiquer les TICE : former les enseignants et les formateurs à de nouveaux usages, (pp.143-158) De Boeck, Bruxelles.
Charlier B., Amaury D., Deschryver N. (2002), Apprendre en collaborant, In R. Guir (ed.) Pratiquer les TICE : former les enseignants et les formateurs à de nouveaux usages, (pp.159-178) De Boeck, Bruxelles.
Rhéaume J., Laferrière Th. (2002), Les communautés virtuelles d'apprentissage, In R.Guir (ed.) Pratiquer les TICE : former les enseignants et les formateurs à de nouveaux usages, (pp.179-196) De Boeck, Bruxelles.
Dillenbourg P., Jermann P. (2002), Internet au service de l'innovation, In R. Guir (ed.) Pratiquer les TICE : former les enseignants et les formateurs à de nouveaux usages, (pp.179-196) De Boeck, Bruxelles.
Henri F., Lundgren-Cayrol K. (2001), Apprentissage collaboratif à distance : pour comprendre et concevoir les environnements d'apprentissage virtuels, Presses de l'Université du Québec, Sainte-Foy.
Hollan J., Hutchins E., Kirsh D. (2000), Distributed Cognition: Towards a New Foundation for Human-Computer Interaction Research, ACM Transactions on Computer-Human Interaction, 7(2), 174-196.
Levy P. (1997), L'intelligence collective et ses objets, http://t0.or.at/levy/plevy.htm
Vygotski L. S. (1985), Pensée et langage. Paris : Editions sociales
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